Oyez, oyez, chers compagnons de plume et d’âme,
Ce jourd’hui, que le Ciel nous prête patience et courage, nous vous faisons humblement savoir que notre présence sera fort réduicte en ces lieux de verbe et de partage. Car, par les hasards et contrariétés du destin, nous nous trouvons en grand labeur, et notre esprit, las, chancelle déjà dès l’aube.
Nous nous acquitterons, certes, de la scripte de nos billets et ferons, avec toute la diligence possible, la distribution des jetons ès projets anciens, lesquels avaient pris retard — que saint Chronos nous pardonne ! Mais pour le reste, nous serons en grand repli, car il nous échoit aujourd’huy de suppléer une âme absente en sa charge, en sus de notre ouvrage ordinaire, ce qui n’est point petite besogne.
Et qu’on se le die : le jour du Mercure est, de coutume, le plus long et harassant de notre semaine. Mais cette fois, l’effort sera double, et notre carcasse n’en sortira point sans meurtrissures. Déjà la veille, en la tombée de la nuit, nous avions prestement pris la place de ladicte personne — laquelle, par fort impromptue nouvelle, s’était dérobée aux heures dernières — et avons ainsi finy la journée le corps rompu et l’âme fléchissante.
Pour comble de peine, la nuit nous fut rude, privée de sommeil. Las ! qu’il est cruel, le démon de l’insomnie, qui nous tourmente lors que repos est le plus requis. Aussi, ce matin, en lieu de joyeux réveil, nous fûmes tirés du peu de sommeil obtenu comme d’un songe troublé, la teste en grand brouillard et l’esprit embué, pour user d’une expression polie.
Bref, nobles amis, ne prenez point ombrage de notre silence. Ce n’est que fatigue passagère, et nous reviendrons, le cœur plus léger, dès que le sort nous en laissera le loisir. D’ici là, que vos journées soient douces, et vos entreprises couronnées de succès.
Que Dieu vous garde.